Ces personnalités
vinrent en effet et décidèrent que les PP. Jésuites
reprendraient le collège. Mais comme ils ne pouvaient
recevoir du personnel de Belgique, il fut décidé
que le collège serait dirigé par une équipe
Jésuites-Pères Blancs. (6) Quelques mois plus tard,
en mars 1941, le Père Monnens, qui avait dû fuir
de Rome au moment de l'invasion de la Belgique et qui était
arrivé au Congo via le Portugal, vint à Bukavu
pour s'occuper de la construction du collège définitif.
C'est lui qui conçut et réalisa le splendide Collège
Notre-Dame de la Victoire. (7) Mais en attendant, l'année
scolaire 1940-41 devait être organisée pour les
quarante-deux élèves, dont vingt-sept internes.
Le bâtiment fut allongé: les couchettes furent superposées
pour augmenter la capacité du dortoir et, durant toute
l'année, on vécut pratiquement au milieu des travaux,
car à chaque trimestre, la place manquait et il fallait
trouver de nouvelles solutions. Bref, ce fut épique. (8)
Comme la salle de récréation avait dû être
transformée en classe, un bâtiment en terre battue
fut construit comme salle de jeux. Ce n'était pas "magnifique"
mais présentait pour les élèves de multiples
avantages. Les charpentes permettaient des acrobaties variées
et comme la monotonie engendre l'ennui, les élèves
avaient toute latitude de modifier l'aspect des lieux. Ils perçaient
de nouvelles fenêtres et en fermaient d'autres: un théâtre
est construit qui occupe une grande partie de la salle (la majorité
des internes étaient du reste acteurs. la difficulté
était de trouver des spectateurs) : les acteurs devaient
veiller avec soin à leurs crânes : ils frôlaient
le toit: les coulisses étaient en plein air et on y accédait
par un beau plongeon à travers une fenêtre conçue
pour cet usage. Les succès furent d'autant plus éclatants
que tout le monde avait pratiquement un rôle à jouer
et que, tout naturellement, on s'estimait satisfait de son travail.
(9) Evidemment toute la vie du collège ne se bornait pas
à ce théâtre, ni aux grandes excursions qui
s'étendirent et gagnèrent en pittoresque et en
imprévu. (10)
En septembre
1940 il y avait une 5e latine (P. Mosmans), une 6e latine (P.
Thuysbaert) et les 7e et 8e (P. Bongaarts). Comme personnel,
c'était fort juste et il ne fallait pas que quelqu'un
tombe malade. Or précisément au début du
troisième trimestre, le P. Thuysbaert dut être opéré
et peu après, le P. Bongaarts alla lui tenir compagnie
à l'hôpital car il s'était vilainement démis
le genou. Il y eut donc quatre classes et un professeur. Ce fut
du sport. Les cours commençaient à 8 heures jusqu'à
midi et reprenaient à 2 heures pour durer jusqu'à
6 heures. Le seul Père survivant allait d'une classe à
l'autre et se faisait aider par les "grands" de 5e
latine qui donnaient à tour de rôle des cours en
7e et 8e. Inutile de dire qu'au point de vue discipline, ces
professeurs " improvisés " étaient de
véritables tyrans, d'une exigence et d'une sévérité
implacable. Ce fut au fond une excellente affaire pour les professeurs
attitrés, car, par contraste, leur sévérité
parut une indulgence toute paternelle et, quand ils reprirent
les rênes, ils trouvèrent un auditoire extraordinairement
bien disposé. (1 ) Cette année scolaire vit les
premières victoires en foot car le P. Bongaarts, connu
bientôt comme un "international de classe", sut
former une équipe qui ne connut pas la défaite
durant de longues années. (2) Ce fut aussi l'année
du lancement de la troupe scoute; les grandes aventures ne manquèrent
pas, entre autres un formidable jeu de Morgan qui passionna la
ville entière et provoqua de sensationnelles courses d'autos.
(3) Pendant ce temps le P. Monnens se démenait pour organiser
la construction du collège et en juillet 1941, les premiers
indices du chantier se dessinèrent sur le terrain. (4) |