A la rentrée
de Septembre 61, la situation à Bukavu ne s'était
guère améliorée. Malgré cela, professeurs
et élèves avaient regagné le Collège:
442 élèves, dont 35 internes. Les élèves
de St. Paul avaient rejoint leur établissement et les
séminaristes étaient retourné au Mugeri.
Cette légère diminution était due aussi
au fait que le Collège posait les mêmes conditions
d'admission que sous le régime métropolitain. De
ce fait, il n'y avait pas grand changement dans le personnel
enseignant. Le P. Jansen, professeur de Rhétorique depuis
54 et connu de tout Bukavu pour ses nombreuses relations et les
conférences religieuses qu'il y donnait, nous avait quittés
pour le Collège d'Usumbura. Il était remplacé
par le P. Croegaert, qui avait cédé la Préfecture
au P. A. De Schrijver, un des pionniers du Collège d'Usa.
Heureux retour que celui de M. Lapage, qui se rendra bientôt
si utile à la mise en marche du nouveau "Cycle d'Orientation".
Le Collège pouvait aussi se réjouir que deux de
nos Anciens élèves étaient engagés
comme professeurs: M. Carlos Ervinck et le P. Marcel Van Parys,
Arrivée aussi du P. De Deckere (6ème Latine), de
M. Hoppenbrouwers (pour les langues) et de M. François
Bouhy, qui remplaçait Jean Dardenne. Me Van der Vorst
et sa fille Bernadette, M. Louis et M. Wilbers venaient renforcer
l'enseignement en Préparatoires. Durant les vacances,
M. Geerts, les PP. Feys et Erkens nous avaient quittés,
ainsi que notre fidèle cordon-bleu: Me Puype. (1)
Une lueur d'espoir semblait poindre à l'horizon avec le
retour du Président Miruho. Mais sa volonté de
faire rentrer le Kivu dans la légalité, et d'y
faire régner la paix, fut paralysée par le double
jeu de l'O.N.U. et les intrigues politiques locales. On entra
bientôt dans l'ère des Commissaires extraordinaires,
dont on avait à peine le temps d'apprendre à connaître
le nom, et qui ne purent guère rétablir la tranquillité.
Les livres scolaires n'arrivaient pas, le Kivu se ressentait
de la guerre contre le Katanga et des troubles au Maniema, les
soldats continuaient à faire la loi. (2)
Avec l'arrivée des Séminaristes, on vit réapparaître
au Collège, des Pères Blancs: le R. P. Verwimp.
Le P. Janssens (P.B.) aida le P. Ministre à ravitailler
le Collège. Deux hommes suffisaient à peine à
trouver le nécessaire, car les magasins se vidaient à
vue d'oeil. Des Pères italiens (Xavériens de Parme),
vivaient avec nous pour y apprendre le Français et le
Swahili. Le Collège était devenu le lieu de passage
des missionnaires et il n'était pas rare d'y rencontrer
plus d'hôtes de passage que de Jésuites. Parmi ces
hôtes, nous avions l'honneur d'avoir en permanence, S.
Exc. Mgr. Cleire. (3) |
Entretemps
le Collège continuait son petit train-train de vie. De
toutes les années scolaires c'est certes la plus difficile
à résumer, non pas que la vie y fut monotone, (les
soubresauts politiques, les couvre-feu, les faux bruits, les
congés accordés à l'improviste par le Gouvernementy
remédiaient) mais parce qu'il devenait de plus en plus
difficile d'organiser quoi que ce soit. On s'amusait comme on
pouvait. Le Victory continuait à jouer au foot, la plupart
du temps contre les soldats malais. Pas question de faire des
excursions : l'essence était rarissime; un accroc au camion
eut été un drame; plus de pièces de rechange
à trouver. Grâce au P. Croegaert, on put heureusement
tourner de nombreux films pour les élèves. Faute
de papier, de stencils et d'un comité, mais aussi parce
que le P. Smets était surchargé de cours au jury
central, Orientation cessa de paraître. Les scouts faisaient
leur possible avec les moyens de bord et organisèrent
un camp très réussi au Mugeri, durant les vacances
de Pâques, (4)
Mais les Etudes continuaient et... comme autrefois. Oui comme
autrefois, c. à d. avec le même programme. Il ne
manquait pas
d'instances congolaises, qui voulaient à tout prix remplacer
le régime métropolitain par un enseignement au
rabais. Le P. Recteur lutta toute l'année pour pouvoir
maintenir le niveau des études, tint à plusieurs
reprises des réunions de parents et rallia enfin le Gouvernement
et l'opinion publique à son idée que le Congo avait
un besoin urgent d'écoles, dans lesquelles on dispenserait
un enseignement de qualité à l'élite congolaise.
(5) Le second trimestre fut attristé par trois mauvaises
nouvelles : le Collège eut, en effet, le triste privilège
d'être le premier informé du massacre des 22 Pères
du St. Esprit à Kongolo. |