Il y plantait
des milliers d'eucalyptus, traçait des allées,
des sous-bois romantiques, où les sceptres de Salomon,
les parterres de lys et de roses encadraient les viviers aux
nénuphars bleus. Oui se rappelle la splendide pelouse
devant la maison de campagne où les antilopes des collines
avoisinantes venaient brouter et se désaltérer
timidement à la fontaine, et les immenses étangs
où l'on faisait de la pisciculture de tilapias ? Mais
pour les élèves, la campagne était autre
chose qu'un endroit romantique. . . elle signifiait... une visite,
bien sûr, à Tatane l'orang-outang, les jeux dans
les bois, les prises de foulard et le feu de camp autour du Calvaire,
entre le lac endormi et les étoiles qui veillaient. (13)
Les vacances de Noël 48, resteront pour beaucoup "
inoubliables ". Ce fut à peu près la dernière
fois que des internes passèrent leurs vacances au Collège.
Le Gouvernement jusqu'alors n'intervenait pas dans les frais
de déplacement. Les élèves partirent donc
pour le Nord. Cette année il en restait une soixantaine.
On sut les occuper ! Après l'épingle à cheveux
de l'escarpement (au Km 102), une visite au Lac Vert et aux Champs
de lave, on se reposa à la Mission de Nyondo.
Le lendemain
on devait vivre une grande surprise, et je pense que peu de coloniaux
ont fait ce que nous avons réussi. |
Après
moultes palabres avec les indigènes de l'endroit, on parvint
à savoir où débouchait l'entrée...
Nous descendîmes et... nous nous trouvâmes devant
d'interminables couloirs qu'avaient laissés sur leur passage
d'anciennes coulées de lave. Parfois, nous devions nous
faufiler dans d'étroites ouvertures ayant à peine
la largeur du bassin, parfois on se promenait dans des tunnels
aussi larges que celui sous l'Escaut. On observait un silence
absolu, car nous avions constaté qu'en parlant des tuiles
de lave nous tombaient sur la tête. Nous y restâmes
une journée entière, bien groupés pour ne
pas se perdre. On se dénombra à l'entrée
et à la sortie... avec cette différence que certains
transformés par la vase et la boue n'étaient plus
à reconnaître! Inoubliable randonnée pour
les heureux qui en firent partie! Les camions grinçants,
filaient le soir même vers la Mission de Rugari et dès
le lendemain on défiait le NyaMulagira. On voulait prospecter
de près les récentes coulées de lave; nous
descendîmes dans le cratère, sur la première
plate-forme s'entend, pour y admirer les crevasses et les fumerolles;
puis, pêle-mêle dans le gîte d'étape,
on s'emmitoufla vaille que vaille (on était à 3.000
mètres d'altitude) et les gars s'endormirent dans les
bras de Morphée, mieux vaudrait dire de Vulcain, en rêvant
de lave et de caves souterraines.
|